jeudi 4 juin 2009

Bon app’

Voilà ce qu'on peut déguster dans un fast-food près de chez moi :
- salades ;
- tex Mexs ;
- burgers ;
- sandwichs ;
- boissons.

Ce panneau étonne mon œil d'éditeur (ou du moins qui tente de l'être). Car si les noms français « salades » et « boissons » ne passeront pas à la casserole cette fois-ci, ce n'est pas le cas des mots étrangers qui se glissent dans ce menu alléchant (il est 19 h).

« Tex Mexs » est le plus gratiné des trois. Déjà blessé de l'amputation de son trait d'union et affublé d’une deuxième majuscule qu’il ne mérite pas, l'adjectif « tex-mex » désigne le mode de nutrition mexicaine adopté par les Texans. Ce mot est issu de la double apocope (réduction d'un mot) sur ces deux termes qui le composent. Par contre, j'observe pour la première fois le passage de cet adjectif vers le coté obscure de la farce, par le phénomène de conversion impropre, telle que l'ont subit les blondes ou les poubelles (on en reparle plus bas) sans qu'on sache toujours le pourquoi du comment (tiens, encore un). Ces mots ont changé de catégorie grammaticale sans pour autant changer de forme. Dans ce restau (apocope...), on peut se rassasier la panse avec des « tex-mexs », adjectif qui devient par ce truchement un nom. Mais ce qui me frappe le plus, c'est le « s » à la fin, car une règle de la grammaire française précise que les mots en « -x » ne prennent pas de « s » au pluriel : des prix, des noix, des volvox. Donc, « tex-mex » en tant que met, d'accord, la langue évolue de manière imprévisible, mais avec un « s », non.

« Burgers », lui est issu de l'inverse de l'apocope, l'aphérèse, où c'est le début du mot qui est amputé : un (auto)bus, un (amé)ricain, des (san)tiags, un (we)blog, et notre (ham)burger. En Allemagne, d'après Wikipédia, il est courant qu'un plat local adopte le nom de la ville dont il est issu, et le hamburger, de Hambourg, ne déroge pas à la règle, au même titre que le Berliner. Pauvre Kennedy, savait-il ce qu'il disait, en se comparant à un beignet ?

« Sandwich », comme la poubelle citée plus haut vient, tout le monde le sait, de noms propres. Pour la poubelle, il s'agit du préfet Poubelle, qui instaura une politique d'assainissement de la ville de Paris, notamment avec l’obligation d’utiliser des récipients pour la collecte des ordures à Paris. Le nom propre glissera irrésistiblement vers un nom commun par une autre forme de dérivation impropre, l'antonomase. C'est le cas aussi pour John Montagu, 4e comte de Sandwich qui donna son nom à cet aliment composé qui lui permettait de manger tout en exerçant son activité favorite : jouer (ou travailler selon d'autres sources). On mangera donc des sandwichs.

Conclusion pour s'entrainer sur les notions abordées dans ce billet
Espérons que ces Michel-Ange du fast-food seront plus accros au dico sinon je les boycotte ! Aller, je vais boire un kir ou un gewurtz.

Dernière minute
L’actualité nous rattrape, hélas, et la disparition du Rio-Paris a été l’occasion pour certains professionnels de sortir un mot de leur jargon, le « cunimb », qui raccourcit le cumulonimbus, ce nuage d’altitude qui aurait causé la perte de l’appareil et surtout de ses passagers.