lundi 19 janvier 2009

Taux c'est taux !

Un taux est un rapport entre deux grandeurs. Ce ratio est très utilisé pour exprimer la plupart du temps un pourcentage ou un rapport sans dimension dans des domaines tels que les sciences sociales, économiques ou en démographie. On peut ainsi calculer un taux de rendement, d'intérêt ou de croissance démographique.

Le taux est apparu un jour à Hartennes-et-Taux, village de l'Aisne qui a également vu les débuts d'un célèbre couple de chanteurs des années soixante-dix : Staux et Chartennes, popularisés par leur titre le plus connu : l'Avventaura, qui, par son succès, a fait croitre le taux de natalité en France. Mais les premières origines du taux sont bel et bien grecques. Ce peuple a ainsi débarqué dans le sud de la France en fondant une ville au bord d'un étang : Thau, sans doute en l'honneur de la dix-neuvième lettre de leur alphabet, tau. La chimie, entre autres disciplines, a également rendu hommage à cette lettre en désignant par tau le taux d'avancement d'une réaction chimique limité. Enfin, les belges ont bien sûr immortalisé ce rapport en créant un monde enfantin et drole autour d'un sympathique petit garçon, Toto, qui confond dans l'une de ces meilleures aventures Skip et slip, trait d'esprit qui fait encore actuellement la renommée des cours de récréation francophones dans le monde entier. Bref, on l'aura compris grace à cette exhaustive et néanmoins brillante démonstration, le taux a un rôle tout à fait central dans notre société : historique (les grecs), scientifique (chimie) ou culturel (Toto).

Comme on l'a précisé avant cette introduction historique qui recentre le débat, le taux est un moyen d'exprimer un pourcentage ou l'évolution d'une donnée utilisé dans de nombreuses disciplines de sciences humaines certes, mais aussi dans les sciences dites « dures ». La médecine et la physiologie sont particulièrement gourmandes de cette donnée pour exprimer la quantité de certaines substances dans le sang. Natrémie (azote), kaliémie (potassium), magnésémie (magnésium) ou encore calcémie (calcium), ces données expriment un taux, une quantité de soluté dans une quantité de sang. On note au passage que ces mots se terminent tous par le suffixe -émie, qui indique que cette quantité est rapporté au sang (-urie pour les urines).

Je propose au passage d'appeler noémie le taux de spam dans les courriels.

La calcémie est donc le taux de calcium dans le sang, exprimé généralement en mg/L de sang ou en µmol/L de sang, tout comme la glycémie est le taux de glucose dans le sang ou tout comme l'alcoolémie est le taux d'alcool dans le sang. Pourtant, ce principe on ne peut plus primaire semble échapper à certains. Pourquoi entend-on souvent parler du taux d'alcoolémie ? Les journalistes, si bien dans leurs baskets, emploient fréquemment cette affreuse redondance au jour d'aujourd'hui, alors que les diabétiques emploient souvent l'expression « taux de glycémie ». En effet, un taux d'alcoolémie serait un taux de taux d'alcool dans le sang. Il existe donc dans cette expression une surabondance de terme, qui n'est autre que le sens grec de pléonasme.

A cette lourdeur s'en ajoute une autre sur le site internet du canard local :

L'erreur, hormis celle du terme qui nous intéresse aujourd'hui est celle de dire " taux d'alcoolémie de 1,20 g". Ici, ce brillant et piteux journaliste confond tout simplement masse et taux. Bravo et merci d'avoir mis en ligne mon commentaire, pour toi, lecteur.

Cette jolie faute pourrait être facilement évitée mais hélas, même les organismes officiels s'en mêlent, comme en témoigne cette capture d'écran du site de la prévention routière :


C'est incompréhensible. La référence à une quantité ethylique apparait sept fois : deux « taux d'alcool » et cinq « taux d'alcoolémie ». Remarquez au passage la magnifique double redondance dans le paragraphe en bas : « taux d'alcoolémie dans le sang ». Pas très sérieux pour un site officiel...

Je pense qu'il serait donc de bon ton d'arrêter de nous polluer l'esprit avec ce genre de petites bêtises au plus taux !